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C'est un rêve qu'elle caressait, petite fille sur les bancs de l'école. Nathalie Burel écrit.

Mais avoue-t-elle « quand je me représentais écrivain, j'imaginais que c'était mon métier ». Ce n'est pas tout à fait le cas, même si les publications s'enchaînent sans difficultés depuis son premier recueil de nouvelles en 2004.

A cause des « contingences matérielles », la jeune femme est (aussi) professeure ; deux vies « cloisonnées » : le jour, elle enseigne, la nuit, elle écrit.

 

 « L'idée de devenir écrivain, je ne suis pas allée la chercher très loin » s'amuse Nathalie Burel qui revendique être « depuis toujours une lectrice assidue ». Entre littérature classique et roman noir américain, elle se dit « boulimique » ; « je m'intéresse de plus en plus à la littérature contemporaine - dit-elle encore – pendant longtemps j'ai pensé que je n'avais pas de temps à perdre avec des auteur-e-s qui émergent alors qu'il y en a tant qui ont déjà été adoubé-e-s ; je rencontre maintenant des gens qui me touchent vraiment ».

Ecrire la nuit dans un temps qui n'existe pas

Nathalie Burel multiplie les expériences artistiques. Auteure de nouvelles et de romans, elle a aussi participé à des ouvrages collectifs sur le sport, un monde qui la fascine depuis longtemps. « J'ai beaucoup pratiqué le sport – dit-elle – et je suis très attirée par cette discipline de l'effort, la beauté des gestes... les scandales, aussi ! » Dans Femmes et Sports, elle signe un texte sur « la jupette des joueuses de tennis » où elle dénonce cette contrainte imposée aux sportives d'être jolies à regarder plutôt que confortables dans leur tenue.

Cofondatrice d'une compagnie de théâtre, elle prête aussi sa voix et sa plume à Megabel et anime des ateliers d'écriture ou encore écrit des paroles de chansons. Ce qu'elle apprécie beaucoup ce sont les collaborations qui dit-elle dans un rire « ne sont pas plus lucratives que la littérature, mais très enrichissantes » et lui permettent de « sortir de l'isolement de l'écriture ».

Burel2C'est la nuit, surtout, que Nathalie s'assoit à sa table de travail à la recherche « d'un temps qui n'existe pas, d'un moment privilégié jamais interrompu par le téléphone ». Pas d'angoisse de la page blanche, son écriture – « assez synthétique » - est aussi « immédiate ». Nathalie écrit un premier jet qui sera ensuite retouché et soumis à l'approbation de quelques proches ; « c'est salvateur pour moi ; j'ai besoin de ce passage-là » explique-t-elle. Parfois, elle tient compte des « critiques » parfois non ; mais dit-elle : « ça me permet d'être certaine de ce que j'ai fait ».

Vivre à Rennes pour rester auprès de ses ami-e-s

Pour Nathalie, l'histoire est allée très vite. Son premier recueil de nouvelles a tout de suite été édité. « Finalement, ça évite les doutes » reconnaît avec philosophie celle qui se destinait justement à l'enseignement de cette matière. C'est une rencontre un peu fortuite avec un éditeur qui a permis cette première publication. Pourquoi écrire ? Comment être publié ? Autant de « questionnements qui ne m'appartiennent pas » dit aujourd'hui l'écrivaine qui affiche une certaine sérénité. « Je ne crois pas que je ferais ça si c'était angoissant ou douloureux » dit-elle.

La jeune femme choisit de rester à Rennes, sa ville de naissance, même si elle sait qu'en matière d'édition, beaucoup de choses se passent à Paris. « Ça m'aurait permis d'autres rencontres – dit-elle aujourd'hui – mais c'est important pour moi d'habiter là où sont mes ami-e-s. »

Avec son dernier roman Stella(s), Nathalie Burel estime être arrivée à « une écriture plus personnelle ». Auparavant, ses nouvelles parlaient des autres, de ces récits de vie recueillis ça et là et transformés ensuite, « ces moments où la vie des gens bascule sur un petit détail ». De tous ces « petits détails » elle faisait des histoires courtes et « l'idée de passer au roman [l]'effrayait un peu ». Avec un premier roman policier en 2006 puis Stella(s) l'an dernier, elle a franchi le pas. Son prochain livre devrait être « plus autobiographique ». « Ça va parler de la famille – dit-elle – et j'y ai mis la mienne, au milieu des autres ! » 

Militer mais avec discrétion

Burel3« J'aimerais n'être occupée que de création artistique » confie Nathalie Burel, rêvant d'un statut de l'intermittence attribué aux écrivain-e-s comme il l'est pour les comédien-ne-s ou les musicien-ne-s. En attendant, elle enseigne le français et l'histoire-géographie dans un lycée professionnel où ses élèves, de la classe de 3ème au BTS, ont entre quinze et vingt ans.

Elle a travaillé avec François Bégaudeau et admire sans mesure son Entre les Murs mais ne puise pas d'inspiration chez ses élèves. Ses deux vies sont « cloisonnées ». « Quand j'écris, j'ai un peu envie de sortir de ce que j'ai vu toute la journée » dit-elle. En revanche, elle n'hésite pas à « relever le défi » de les faire lire davantage quitte à tricher un peu sur le nombre de lectures obligatoires.

Nathalie propose à ses élèves des livres qu'elle « a lu et apprécié » et qu'elle pourrait « offrir à des ami-e-s ». Elle qui dit avoir « un militantisme très discret » en profite notamment pour leur faire découvrir Annie Ernaux, une auteure (féministe) qu'elle « aime énormément ».

Geneviève ROY

Photo 1- Elie Jorand

Pour aller plus loin :

Lire : Stella(s) de Nathalie Burel – éditions Goater (2016)

Ecouter : Megabel – projet en ligne, « combinaison d'un microphone et d'un crayon »