Avec les femmes, l'agriculture est appelée à se renouveler. Elles sont souvent plus inventives que les hommes mais aussi plus isolées. L'AFIP Bretagne, consciente de leur problématique spécifique, leur propose des temps de formation et les invite à prendre la parole lors de rendez-vous animés par Camille Botella.

Les femmes seraient plus sensibles que les hommes à l'agriculture biologique. On les dit plus motivées par les questions de santé et d'environnement. C'est ce qui ressort des chiffres de la région Bretagne que Camille Botella, animatrice et formatrice à l'AFIP, pose comme constat pour expliquer pourquoi l'organisme qui l'emploie s'intéresse particulièrement au rôle et à la place des femmes en agriculture. « On va lancer une enquête pour valoriser le travail des femmes en agriculture » dit-elle mais elle peut déjà avancer certains chiffres. «Parmi les agriculteurs de moins de quarante ans, on a une sur-représentation des femmes en production biologique ; 9% des femmes cheffes d'exploitation sont en bio contre 4% des hommes. » Mais ce n'est pas tout ; avec les femmes, on parle aussi d'innovation, de nouvelles filières (ventes directes à la ferme, transformation des produits, ferme pédagogique, etc.). Aujourd'hui, 17% des femmes sont en circuit court contre 11% des hommes et 14% ont développé au moins une activité de diversification (contre 7% des hommes).Camille Botella AFIP-2

Malgré tout quand Camille Botella rencontre des femmes agricultrices c'est souvent pour évoquer leurs nombreuses difficultés à faire leur trou dans cette profession encore largement masculine. « Elles ont toutes des problèmes de statut – explique-t-elle – elles ne savent pas le choisir ou le choisissent mal ; parfois, elles n'en ont pas du tout. Toutes ces questions qu'on croyait déjà traitées depuis longtemps ont encore du mal à avancer. » Et c'est pour elle, une exigence professionnelle : « on doit rester vigilants car on n'est plus dans la transmission familiale en agriculture et toutes ces évolutions dans les profils agricoles notamment en agriculture biologique risquent de creuser de nouvelles inégalités. »

Si on en parlait

La première réponse de l'AFIP mise en place depuis un an, c'est le Café Parlotte. Un titre qui a été difficile à trouver et qui aujourd'hui fait polémique. Certain-e-s reprochent à l'AFIP d'utiliser un stéréotype en associant les femmes au bavardage. Pour sa défense, Camille Botella invoque le titre plus « officiel » du projet : les cafés CARMA pour « contribution des agricultrices au renouvellement des métiers agricoles ».
Mais au-delà des mots, c'est bien de parler justement dont ont besoin les femmes de l'agriculture, souvent isolées et confrontées comme les autres femmes et parfois plus qu'elles à un univers d'hommes.
En un an, quatre « Cafés Parlotte » ont permis à une trentaine de femmes, souvent jeunes, de se rencontrer afin d'échanger sur leurs difficultés et leurs questions. Un lieu de parole voulu pour créer des liens entre femmes sur un territoire et qui voit émerger de nouvelles pistes d'action.
Pour l'AFIP Bretagne, ces « cafés » ne sont que le début d'une histoire à construire. Des discussions ont émergé les préoccupations des femmes, des thèmes qu'elles souhaitent approfondir, « une envie d'aller plus loin, d'être informée sur leurs droits. »
Et l'AFIP tente d'y répondre en organisant des conférences, en faisant circuler des brochures, etc. Dans les semaines qui viennent, le salon de Guichen du 11 au 13 octobre - « la terre est notre métier » pour les professionnels et « Ille et Bio » pour le grand public - sera l'occasion de deux nouveaux rendez-vous : le samedi un Café Parlotte sur la parentalité à 17h 30 et le dimanche à 13h 30 une conférence sur l'indépendance économique et financière des femmes en agriculture.
Des formations sont aussi programmées notamment sur "la répartition des tâches et des rôles dans la ferme quand on travaille en couple", une formation à laquelle bien sûr les deux membres du couple doivent participer. Et puis, pour les femmes seules un temps de réflexion sera proposée fin 2013 ou début 2014 sur l'accès aux responsabilités.

Geneviève ROY

Aller plus loin : le dossier complet sur la place des femmes dans l'agriculture et notamment la question des statuts sur le site de la France Agricole (sur abonnement)